La violence de la géographie nippone a conduit ses habitants à user d’une gamme d’expressions et de sentiments basés sur une sensibilité pleine de mélancolie et de raffinement esthétique. Dans ce pays turbulent, la beauté s’appréhende toujours de manière détournée. Le masque parle, le geste dit, le silence explique.
Les deux principaux concepts de beauté naissent vers l’an mille. Leur application dans l’art, l’architecture, la littérature, l’artisanat mais aussi le costume et le maquillage des dames de cour traduit un goût marqué pour le mystère de la beauté discrète, l’esthétique de la pureté, la tristesse dans la contemplation de la nature, le culte des saisons, l’élégance des couleurs naturelles.
Quelques siècles plus tard, le bouddhisme pose les bases d’une esthétique nouvelle, faite de renoncement, de modestie et de frugalité, adaptée au milieu des guerriers et à celui des moines. La recherche du geste parfait trouve son apogée dans les arts liés à la cérémonie du thé dont l’exigeante gestuelle peut être comprise comme un entraînement martial. Une gamme d’objets raffinés dans leur simplicité naît alors pour répondre aux trois concepts de wabi, sabi et suki, qui restent une référence pour qualifier l’émotion que l’on peut ressentir à la vue de certains objets.
Ces deux séries de notions esthétiques sont encore à la base des créations artistiques d’aujourd’hui, dans le milieu de l’artisanat traditionnel comme dans celui du design.